Rarement aura-t-on vu un tel revirement de situation chez les chercheurs en une petite dizaine d'années. Poison vanté désormais pour ses bienfaits, le café ne cesse d'être mis de l'avant dans la plupart des études s'intéressant à son cas. Contre la cirrhose, la déprime, le cancer: chaque semaine ou presque, les médias annoncent une bonne nouvelle.
Au milieu des années 80, on se trouvait pourtant bien loin du compte. «Son image était celle d'un liquide qui favorisait notamment le développement du cancer de la vessie», rappelle Astrid Nehlg, directrice de recherche Inserm à Strasbourg, en France, et spécialiste de la question. Ces soupçons ont même amené le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), organisme relié à l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), à classer officiellement le café comme possiblement cancérogène, en 1991.
Selon Astrid Nehlig, les chercheurs ont alors fait fausse route notamment parce que «toutes les études expérimentales étaient faites avec des doses de caféine qui n'avaient rien à voir avec les doses normales qu'on boit au quotidien». Une fois le tir rectifié, les résultats positifs ont commencé à s'enchaîner.
Les effets sur l'activité cérébrale figurent parmi les plus importantes découvertes. «On sait que boire trois-quatre tasses de café par jour, voire même juste deux, au cours d'une vie, ralentit le déclin cognitif, notamment chez les femmes. Il nous reste à comprendre pourquoi cela se produit», explique Astrid Nehlig.
Cette dernière parle aussi d'un «effet protecteur très puissant de la caféine contre la maladie de Parkinson», avec un «vrai effet causal», cette fois plus marqué chez les hommes que chez les femmes. Les données seraient par ailleurs «très encourageantes» pour la maladie d'Alzheimer.
La caféine ne constitue pas la seule «arme fatale» et il s'agit d'une autre raison expliquant la nouvelle réputation du café. Les chercheurs se sont (enfin) penchés sur les différentes composantes du liquide et de leurs potentiels effets.
Les antioxydants sont les principaux concernés par cette nouvelle approche, amenant d'autres découvertes réjouissantes. Ainsi, des études datant des années 2000 ont montré qu'ils avaient un effet «très puissant pour la prévention du diabète de type 2». «Toutes les données vont dans le même sens, bien qu'il reste à décrypter le mécanisme en question», ajoute Astrid Nehlig.
ENCORE DES QUESTIONS ET DES BÉMOLS
Malgré la révolution, le ciel n'est pas totalement bleu pour le liquide noir. Il «peut augmenter l'anxiété chez certains individus particulièrement sensibles», concède par exemple Astrid Nehlig. Autres problèmes observés: un certain effet négatif sur le glaucome chez les personnes âgées et des incertitudes concernant l'hypertension.
De son côté, l'OMS a mis en garde, en juin, les personnes habituées à boire leur café (ou leur thé) trop chaud: cela pourrait favoriser à long terme le cancer de l'œsophage. Néanmoins, ce n'est pas le produit en lui-même qui est visé ici, mais sa température, tout comme ce qui a trait aux possibles désagréments du café au lait sur la digestion.
Du reste, le CIRC et l'OMS ont, toujours en juin 2016, déclassé le café comme possiblement cancérogène. L'équipe de Dr Dana Loomis, responsable de cette décision, a étudié plus d'un millier de travaux avant d'en arriver cette conclusion.
Au final, Astrid Nehlig estime qu'il «n'y a pas tant des dangers que ça» qui émergent globalement des différentes études faites ces dernières années. Bref, le café semble bien installé dans un fauteuil royal en tant que produit à privilégier pour être en santé. Qui l'eût cru...
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